Les sources écrites du droit se présentent sous la forme d’une hiérarchie des normes, également appelée Pyramide de Kelsen.
Au sein de cette pyramide, il faut distinguer 4 grands blocs :
– le bloc de constitutionnalité,
– le bloc de conventionalité,
– le bloc de légalité,
– le bloc réglementaire.
1. Le bloc de constitutionnalité
Le bloc de constitutionnalité est situé au sommet de la hiérarchie des normes. Il contient les normes juridiques suprêmes de l’État, les normes fondamentales sur lesquelles reposent les autres normes.
REMARQUE : Il n’existe pas de hiérarchie entre les différents éléments du bloc de constitutionnalité.
Le bloc de constitutionnalité a été construit au fil du temps :
1.1. La Constitution du 4 octobre 1958
La Constitution du 4 octobre 1958 est la norme suprême du système juridique français.
C’est le texte fondateur de la Ve République.
La Constitution organise l’existence, la structure et le fonctionnement des pouvoirs publics et prévoit les règles de sa propre révision.
1.2. La Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen du 26 août 1789 (DDHC)
La DDHC de 1789 définit de nombreux droits naturels et imprescriptibles tels que la liberté, la propriété, la sûreté ou encore l’égalité devant la loi et affirme le principe de la séparation des pouvoirs.
RAPPEL
A ne pas confondre avec :
– la Déclaration universelle des droits de l’homme – DUDH (1948)
– la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales – CEDH (1950)
1.3. Le préambule de la Constitution du 27 octobre 1946
Le préambule de la Constitution de 1946 vise deux types de principes :
– les principes politiques, économiques et sociaux particulièrement nécessaires à notre temps (PPNT),
– les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République (PFRLR).
Les PPNT sont limitativement énumérés :
– le droit d’obtenir un emploi,
– le liberté syndicale,
– le droit de grève,
– le droit de mener une vie familiale normale,
– le droit à la protection de la santé.
Les PFRLR, qui ne sont pas limitativement énumérés, sont évoqués dans la partie suivante.
1.4. Les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République (PFRLR)
Les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République sont des principes expressément visés par le Préambule de la Constitution de 1946, sans toutefois être énumérés.
Ils ont été dégagés au fil du temps par les décisions du Conseil Constitutionnel, et plus exceptionnellement, par le Conseil d’État :
Principe | Décision |
---|---|
la liberté d’association | [Cons. Const., 16 juill. 1971, n°71-44] |
les droits de la défense | [Cons. Const., 2 déc. 1976, n°76-70 DC] |
la liberté individuelle | [Cons. Const., 12 janv. 1977, n°76-75 DC] |
la liberté d’enseignement | [Cons. Const., 23 nov. 1977, n°77-87 DC] |
la liberté de conscience | [Cons. Const., 23 nov. 1977, n°77-87 DC] |
l’indépendance de la juridiction administrative | [Cons. Const., 22 juil. 1980, n°80-119 DC] |
l’indépendance des professeurs d’université | [Cons. Const., 20 janv. 1984, n°83-165 DC] |
la compétence exclusive de la juridiction administrative pour l’annulation ou la réformation des décisions prises dans l’exercice des prérogatives de puissance publique | [Cons. Const., 23 janv. 1987, n°86-224 DC] |
la compétence de l’autorité judiciaire quant à la protection de la propriété immobilière | [Cons. Const., 25 juill. 1989, n°89-256 DC] |
l’existence d’une justice pénale pour des mineurs | [Cons. Const., 29 août 2002, n°2002-461 DC] |
l’utilisation de lois locales en Alsace et Moselle | [Cons. Const., 5 août 2011, n°2011-157 QPC] |
le refus d’extradition d’un étranger dans un but politique | [CE, Ass., 3 juill. 1996, Koné] |
1.5. Les principes à valeur constitutionnelle
Les principes à valeur constitutionnelle sont des principes dégagés par le Conseil constitutionnel.
Ce sont des créations jurisprudentielles sans aucune référence à un texte écrit.
Ces principes doivent être respectés par tous les organes de l’État, et notamment par le législateur.
EXEMPLE
Principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la personne humaine
[Cons. Const., 27 juil. 1994, n°94-343/344 DC]
1.6. Les objectifs à valeur constitutionnelle
Les objectifs à valeur constitutionnelle ne sont pas des droits mais des orientations dégagées par le Conseil constitutionnel qui doivent être prises en compte par le législateur lorsqu’il légifère.
EXEMPLE
Objectif de valeur constitutionnelle de protection de l’environnement
[Cons. Const., 31 janv. 2020, n°2019-823 QPC]
1.7. La Charte de l’environnement de 2004
La Charte de l’environnement introduit en droit français des principes, droits et devoirs en lien direct avec la protection de l’environnement, tels que le principe de précaution.
Elle énonce notamment que l’environnement est le patrimoine commun des êtres humains et que sa préservation doit être recherchée au même titre que les autres intérêts fondamentaux de la Nation.
2. Le bloc de conventionalité
Le bloc de conventionalité est supérieur au bloc de légalité [art. 55 Const.] et inférieur au bloc de constitutionnalité [art. 54 Const.].
Voir les arrêts : [CE, 30 oct. 1998, Sarran et Levacher] et [Cass. Ass. plén., 2 juil. 2000, Fraisse].
Le bloc de constitutionnalité contient tous les accords et traités internationaux ainsi que le droit européen.
2.1. Les accords et traités internationaux
Les accords et traités internationaux, regroupés sous le terme générique «conventions internationales », sont conclus entre des états souverains ou entre des états souverains et des organisations internationales.
Ces accords peuvent être :
L’objet de ces conventions peut être de mettre fin à un conflit, d’organiser les rapports entre les signataires, d’unifier le droit, d’instaurer des organisations internationales,…
EXEMPLE
Charte des Nations Unies du 26 juin 1945 qui a créé l’ONU.
L’application en France d’un accord ou traité international suppose la réunion de trois conditions cumulatives :
– la ratification : approbation de la convention par le Président de la République [art. 52 Const.],
– la réciprocité : application effective du traité par l’autre partie [art. 55 Const.],
– la publication.
2.2. Le droit européen
Le droit européen est une expression large qui désigne le droit issu du Conseil de l’Europe ainsi que le droit issu de l’Union européenne.
2.2.1. Le droit du Conseil de l’Europe
Le Conseil de l’Europe est une organisation fondée par le traité de Londres du 5 mai 1949.
Le Conseil de l’Europe est à l’origine de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (Convention européenne des droits de l’Homme – CEDH).
Cette convention contient de nombreux droits et libertés fondamentales comme le droit à la vie, le droit à la justice, le droit à un procès équitable, la liberté d’expression,…
La Cour européenne des droits de l’Homme est compétente pour statuer sur les atteintes à cette convention.
2.2.2. Le droit de l’Union Européenne
Autrefois appelé « droit communautaire », le droit de l’Union européenne est composé de deux groupes de dispositions : le droit primaire et le droit dérivé.
DROIT PRIMAIRE
Il se compose de tous les traités :
Traités fondateurs | Traité de Paris du 18 avril 1951 Traité de Rome du 25 mars 1957 Traité de Maastricht du 7 février 1992 |
Autres traités | Acte unique européen des 17 et 28 février 1986 Traité d’Amsterdam du 2 octobre 1997 Traité de Nice du 26 février 2001 Traité de Lisbonne du 13 décembre 2007 … |
DROIT DERIVE
Le droit dérivé désigne l’ensemble des textes normatifs, dérivés des traités, qui émanent des organes de l’Union européenne :
Règlements | Règles de portée générale, obligatoires dans tous leurs éléments, directement applicables dans tous les états membres. |
Directives | Règles de portée générale, obligatoires quant aux objectifs fixés dans leurs dispositions, qui doivent être transposées dans l’ordre interne de chaque état membre. |
Décisions | Règles obligatoires adressées spécifiquement à une personne ou un état membre. |
Recommandations et avis | Textes sans portée obligatoire contenant un conseil ou une incitation. |
3. Le bloc de légalité
Le bloc de légalité est inférieur au bloc de conventionalité et supérieur au bloc règlementaire.
Il contient toutes les normes de valeur législative.
3.1. Les lois organiques
Les lois organiques précisent les modalités d’organisation et de fonctionnement des pouvoirs publics dans les cas prévus par la Constitution.
3.2. Les lois référendaires
L’article 11 de la Constitution prévoit la possibilité de soumettre au référendum un projet de loi.
La loi ainsi adoptée est une loi référendaire.
3.3. Les lois ordinaires
L’article 34 de la Constitution liste les domaines qui entrent dans le champ de la loi au sens strict, i.e. tout texte adopté par le pouvoir législatif, le Parlement.
3.4. Les ordonnances ratifiées
L’article 38 de la Constitution permet au gouvernement, sur autorisation du Parlement, de prendre des ordonnances dans des domaines qui relèvent en principe de la loi [art. 34 Const.].
Pour que ces ordonnances aient valeur de loi, elles doivent être ratifiées par le Parlement par l’adoption d’une loi de ratification.
3.5. Les règlements autonomes
L’article 37 de la Constitution prévoit que tout ce qui ne relève pas du domaine de la loi [art. 34 Const.] est de la compétence du pouvoir règlementaire.
Les règlements peuvent avoir pour objet de préciser les détails concernant l’application et l’exécution d’une loi ou être totalement indépendants d’une loi préexistante. Dans ce second cas, il s’agit d’un règlement autonome, pris en application de l’article 37.
4. Le bloc réglementaire
Le bloc règlementaire est inférieur au bloc de légalité.
Les décrets ont des actes pris par le Président de la République (décret présidentiel) ou le Premier ministre (décret ministériel) dans l’exercice de leurs fonctions respectives.
Les arrêtés sont des actes émanant d’une autorité administrative autre que le Président de la République ou le Premier ministre. Ils peuvent être ministériels, préfectoraux ou municipaux.
En dessous du bloc règlementaire se trouvent les autres actes administratifs (directives et circulaires).
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